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Electrolyse et modulation du nucléaire

Contribution de l’électrolyse à l’intégration des énergies renouvelables et à l’optimisation du système électrique français

Paris le 10 octobre 2018

  1. Le nucléaire en France au cœur de l’équilibre du système électrique

Avec 58 tranches de centrales nucléaires représentant une puissance installée de 63,13GW l’énergie nucléaire assure près de 80% de la production d’électricité en France (72,13% en 2016 et 77% en 2014)

Ceci est bien connu. Ce qui l’est un peu moins est que le nucléaire assure aussi une très grande part des besoins de modulation du réseau :

Réglage de fréquence :

Les centrales sont réglées pour fournir +/-7% de la puissance nominale en réglage de fréquence (+/-2% réglage primaire et +/-5% en réglage secondaire)

Modulation et suivi de charge

Toutes les tranches, sauf celles de la série CP0 (Fessenheim et Bugey représentant 8% de la puissance nucléaire installée) sont capables d’offrir une capacité de modulation de 80% de la puissance installée avec des rampes entre 3% et 5% par minute (le niveau de production doit être au minimum de 20% de la capacité installée)

Le parc nucléaire est donc actuellement encore en mesure de répondre largement aux besoins de flexibilité induits par le développement des renouvelables, mais au prix d’un taux de charge réduit des centrales et donc de perte de valeur importante.

  • Estimation de la modulation du nucléaire

D’un point de vue économique autant que du point de vue des émissions de CO2, cette modulation correspond à une destruction de valeur.

C’est la raison principale pour laquelle, en termes d’émissions de CO2, le système électrique français de bénéficie pas du développement des énergies renouvelables :

(Source RTE)

La production d’hydrogène par électrolyse permettrait, par sa flexibilité et sa demande additionnelle en énergie renouvelable, de limiter très sensiblement cette modulation.

Nous avons quantifié, d’une façon conservative, cet apport à partir des données de consommations horaires de l’ensemble des groupes nucléaires disponibles sur le site de RTE pour les années 2014 et 2016

Pour chacun de ces groupes (hors tranches série CP0) nous avons identifié et quantifié cette modulation de la façon suivante[1] :

  • Identification : à chaque fois que la puissance produite est comprise entre 20% et 86% de la puissance installée (si moins de 20% le groupe est à priori en dehors de la plage de flexibilité et au-dessus de 86% le groupe participe potentiellement en réglage de fréquence[2])
  • Quantification : sur chaque heure identifiée, la modulation est quantifiée par la différence entre la puissance produite et 93% de la puissance installée (afin de rester disponible pour le réglage fréquence)

En annexe 1, nous présentons des exemples d’identification et de quantification

Résultat pour 2014

Le volume modulé (hors control fréquence) total représente près de 12 TWh (11,924TWh)

Résultat pour 2016

Le volume modulé (hors control fréquence) total représente plus de 8 TWh (88,228TWh)

  • Apport de l’électrolyse de masse

Nous avons donc aussi quantifié le fonctionnement d’usines de production d’hydrogène par électrolyse qui limiterait au maximum cette modulation.

Nous avons fait les calculs pour des installations de 200MW à 900MW d’électrolyse.

Résultat pour 2014

  • Une usine d’électrolyse de de 200MW aurait un facteur de charge de 89% (7802h/a), consommerait 1,56TWh et produirait 28 500 t H2
  • Une usine d’électrolyse de de 500MW aurait un facteur de charge de 83% (7300h/a), consommerait 3,66TWh et produirait 66 500 t H2
  • Une usine d’électrolyse de de 600MW aurait un facteur de charge de 81% (7110h/a), consommerait 4,27TWh et produirait 77 588 t H2
  • Une usine d’électrolyse de de 900MW aurait un facteur de charge de 73% (6437h/a), consommerait 5,79TWh et produirait 105 348 t H2

Il est intéressant de rapprocher ces volumes de production d’hydrogène avec le Plan de Déploiement de Hydrogène présenté par le gouvernement le 1er juin 2018 :

Mesure 1 : 100 000 t H2 dès 2023

Résultat pour 2016

  • Une usine d’électrolyse de de 200MW aurait un facteur de charge de 82% (7201h/a), consommerait 1,44TWh et produirait 26 232 t H2
  • Une usine d’électrolyse de de 500MW aurait un facteur de charge de 72% (6304h/a), consommerait 3,16TWh et produirait 57 413 t H2
  • Une usine d’électrolyse de de 600MW aurait un facteur de charge de 69% (6034h/a), consommerait 3,63TWh et produirait 65 938 t H2
  • Une usine d’électrolyse de de 900MW aurait un facteur de charge de 60% (5239h/a), consommerait 4,72TWh et produirait 85 872 t H2
  • Conclusion

Avec Flamanville 3 (1600MW) qui va rentrer en service prochainement, 3 à 5TWh d’électricité renouvelable rajoutée chaque année sur le réseau électrique en France et une demande constante (tendance décroissante), le déploiement massif de l’électrolyse c’est ici et maintenant et à un rythme de plusieurs centaines de MW par an. La demande supplémentaire d’électricité renouvelable pendant de longues heures d’utilisation induite par cette production d’hydrogène ne générera aucune émission de CO2 additionnelle et permettra de décarboner d’autres secteurs : transport, industrie & chauffage.

C’est le principe de l’intégration trans sectorielle, une opportunité industrielle unique pour la France

Annexe 1 :

Exemple d’identification et de quantification (Blayais 2 et Chooz 1 en 2016)


[1] Il s’agit d’une estimation simplificatrice et conservatrice indépendante de contraintes d’exploitation qui ne sont connues que par EDF.

[2] L’électrolyse par sa flexibilité serait en mesure d’assurer aussi une grande partie du réglage fréquence.